mardi, avril 22, 2008

For no one

Diiiiieeeeegggoooooo Aaaarrrmmaannnnddddoooo Maaaarrraaaadddoonnnaaaaaaaaaa.
Oui c'est un nom difficile à porter et ça rentre rarement dans les cases.


Déjà je dois dire un Merci très personnel, c'est pour cette raison que je le fais ici, en espérant que cette personne le voie un jour. Je dois lui dire merci de m'avoir procuré un des plus grands moments de jubilation estudiantine. A l'époque on disait qu'on était en maîtrise, il fallait faie un exposé pendant l'année en espagnol, sujet libre. Entre la corrida, la gastronomie, l'histoire, le cinéma, les auteurs, les peintres, les sculpteurs, des sujets sérieux de société, je l'ai choisi comme sujet, ai écrit un texte en français, traduit en espagnol, trouvé une vidéo avec commentaires en espagnol, la totale. Du bonheur, et un bonheur décuplé lorsque devant les regards désespérés de mes camarades sérieux, j'ai annoncé Maradona. Du foot, du foot en maîtrise, du foot pour un exposé, en plus un drogué... non mais il sort d'où celui-là. Ma modestie souffrirait si je n'ajoutais pas que j'ai eu la meilleure note de cette classe. En vous remerciant.


Diego Armando Maradona.


Trois mots, trois noms qui raisonnent comme le talent, le ciel albicéleste, comme la déchéance, la honte. Un petit teigneux des bidonsvilles de Buenos Aires, un petit, des petites jambes, des grosses cuisses, un torse large, et une tignasse que les afros n'auraient pas refusée. Ce qui donne un centre de gravité idéalement bas, une puissance de démarage exceptionnelle, une fréquence de battement de jambes digne de Bip Bip et une vista, un temps d'avance dans l'action que peu, très peu ont eus. Maradona, en résumé c'est le génie précoce, le non sélectionné pour le sacre de 78, l'échec de 82, le désert barcelonnais en 82-84, la réussite naoplitaine jusqu'en 90, le sacre mexicain, la main de dieu, le but du siècle, les larmes de Rome, la cocaïne, la déchéance, les errances espagnoles, le rachat argentin, Cuba, Fidel Castro, les excès d'alcool, de drogue, de nourriture, l'obésité, l'arrêt cardiaque, la folie, le populaire, le coeur, un petit, un grand, un surhomme, un homme, un enfant. Inutile de parler des pages les plus célèbres de sa carrière, on les connait, même de loin, tout le monde en a entendu parler et a son opinion.


Mais un jour d'été 1994, il y a eu autre chose, un minute passée sous le silence de l'éphédrine. C'est le mondial américain, et Il est là, de nouveau, après sa suspension cocaïnée. Il joue, Il a le brassard de capitaine sans doute pour sa dernière coupe du monde, Il voudrait bien redevenir le roi. Il l'est redevenu un instant, le temps d'un regard, le temps d'un cri, le temps d'un but, pas plus. C'est un match contre la Grêce, faible faire-valoir pour cette équipe, c'est une victoire tranquille 4-0, il me semble. On Le voulait présent, on Le voulait sain(t), on Le voulait ressuscité. Ce fut davantage. C'est une action rapide, 6 ou 7 passes sur 20m2 avec 4 ou 5 joueurs différents. L'adolescent s'en souvient, se souvient de ces passes, une deux, feinte, une touche de balle, petit pont, et cette balle qui Lui arrive. Un contrôle intérieur gauche à l'entrée de la surface de réparation (je me suis toujours demandé pourquoi ce nom de surface de réparation, ça fait garagiste...), une feinte de frappe pour un extérieur du gauche histoire de se décaler des défenseurs devant lui, il met en joue, il arme, les suppliciés ferment les yeux devant le bourreau, une détonation, Il tire, un seul coup, sec, sans appel, Il a décidé de tuer les démons, Ses démons et le vulgaire ballon, part, droit, file, il monte, le gardien ne peut rien, à la fin de l'envoi, Il touche, c'est la lucarne.


Maradona est de retour, Il a montré qu'Il était de nouveau le Messi. Il y a ce but, mais il y a cette course, cette célébration du but, habituellement si ridicule. Mais cette course, c'est autre chose, c'est celle du revenant. Cette course, c'est celle d'un illuminé, d'un fou, elle vient d'outre-tombe, le visage déformé n'est plus humain, ce regard rend joyeux, rend triste, effraie. Ce cri sent la renaissance, la vie, le plaisir. Il sent aussi la revanche, la rage, la passion. Contre ceux qui l'ont condamné, enterré, jugé... Lui en premier lieu. Il court vers la caméra la plus proche, celle du bord du terrain. Maradonna est seul, ceux qui viennent le féliciter n'ont pas compris, Il est seul, comme Il l'a toujours été dans ses succès et ses échecs. Rien ne compte en dehors de ce que disent ce regard et ce cri. On le voit Lui, cet enfant, capricieux, revanchard, orgueilleux, mais spontané, naïf, fragile. Ce but c'est sa dernière victoire, éphémère. Quelques jours plus tard, Il est contrôlé positif à l'éphédrine, exclu de son équipe. Voué aux gémonies et à la vindicte populaire, il redevient cet animal de foire médiatique, un enfant de Freaks. Comme si cela le remettait au même niveau que les autres, au contraire.


Mais il a triché, de nouveau il s'est fait prendre, il a été condamné, banni devant le monde entier. Qu'on lui pardonne ou pas, ce dernier regard, ce dernier cri, c'est la vie de celui qui a triché, de celui qui cru qu'il avait trompé Son monde. Mais on ne le trompe jamais longtemps, cela se voit, surtout dans le regard d'un enfant, c'est ce qui en fait le côté pathétique, tragique, mais quand ce regard se veut sincère, quand c'est un gamin qui cache sa bêtise, on le trouve beau et fort, simple et pur. Touchant. Maradona c'est cela. Un enfant que l'on croyait adulte. Qu'il reste enfant.