Commentaire composé à partir de
l'entretien de Joey Barton dans l'Equipe du 1er septembre 2012.
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JOEY BARTON, le nouveau milieu de l’OM, explique son choix de
quitter l’Angleterre, où son image sulfureuse ne correspond pas, selon lui, à
ses qualités de joueur.
Le personnel de son hôtel à Marseille le trouve très abordable,
Son hôtel, son hôtel ?? il a déjà
commencé à placer dans l’immobilier local ?
et ça tombe bien. Hier soir, dans l’attente d’un coup de fil des
dirigeants marseillais, Joey Barton (30 ans demain, prêté par QPR) n’avait pas
le droit de quitter les lieux,
Après la suspension, la prison, normal. Et
après il aura le droit de pointer tous les jours, sinon amende. La vie de
footballeur est d’un triste.
pour arriver le plus vite possible au centre
Robert-Louis-Dreyfus et signer son contrat. Il était en pleine interview quand
José Anigo, le directeur sportif, est finalement venu le chercher, vers 20h 30.
Le journaliste sous la menace d’une arme ne
peut pas révéler qu’Anigo était accompagné de ses meilleurs amis, 6 dobermans.
« Vous voulez que je revienne après ? », a lancé l’Anglais, affable
et drôle. Ça aurait fait tard. Dommage.
A L’Equipe, on se couche donc à 20h30, pour
être bien en forme et ne pas rater la rediffusion des Grosses têtes, cette
émission affable et drôle.
MARSEILLE –
de notre envoyée spéciale
C’est fin, mais on a envoyé une femme dans un
hôtel la nuit pour interroger un joueur de foot enfermé…
« - QUE CONNAISSEZ-VOUS du Championnat de France ?
Bien joué, il ne pourra faire pire que la
réponse d’Ibrahimovic à la même question.
– On n’en voit pas beaucoup en Angleterre. Maintenant, ESPN en
passe un peu le dimanche, mais seulement les grandes équipes.
Et les grands matchs… donc il nous parle
d’ESPN Classic et de l’épopée des Verts.
Et on les voit aussi en Coupe d’Europe.
C’est confirmé. On parle des années 70’s.
J’ai vu un peu Marseille l’an dernier, parce qu’ils ont été en
quarts de finale de la Ligue des champions,
On ne le dira jamais assez, Marseille fait
partie des 8 meilleures équipes d’Europe de la saison 11-12.
ils ont été éliminés par le Bayern (0-2, 0-2), je me souviens.
Je regarde beaucoup le foot, donc j’ai vu un peu ça. Je regarde aussi
l’Espagne, l’Italie, même si c’est moins bien qu’avant.
Aucun rapport avec la question mais on ne
contredit pas un taulard.
Quand j’étais petit, l’Italie me faisait rêver, Gullit, Van
Basten, Batistuta… Aujourd’hui, les stars vont en Premier League. Ou au PSG !
Quel sens de l’à-propos pour un joueur
arrivant à Marseille. Affable, drôle, mais menacé de mort par les supporteurs
au bout de trois jours.
– Et vous, vous allez à Marseille…
La journaliste ne s’est pas rendue compte tout
de suite que cela aurait pu très mal tourné à ce moment précis.
– Depuis tout petit, je suis le foot. Mon premier souvenir,
c’est la Coupe du monde 1990 avec Roger Milla. Je me souviens aussi très bien
de Marseille qui gagne la C 1 en 1993 avec le but de Boli contre Milan. Völler,
Boksic, Waddle…
Bon c’est presque ça. Mais Waddle était déjà
parti en 93. La journaliste connaissait bien le sujet.
On a moins vu Marseille ensuite en Angleterre avec Tapie et le
scandale des matches truqués.
Forcément en D2, c’est plus compliqué.
Ils ne passaient plus à la télé. Puis il y a eu Drogba, et ils
ont encore fait une finale de Coupe de l’UEFA (en 2004, perdue 0-2
contre Valence CF). Ils avaient joué contre Newcastle en demi-finales.
– Newcastle, votre ancien club.
Ndlr : Un de vos anciens clubs…
– Newcastle sera toujours dans mon coeur. City, pas autant.
Oui du côté droit, celui du portefeuille.
J’y ai joué neuf ans (jusqu’en 2007), j’avais de bons rapports
avec les fans, mais le club a changé. Beaucoup de gens sont partis, d’autres
sont arrivés. Quand l’argent arrive dans le foot, ce n’est plus l’équipe du
peuple.
Bah si. Si le peuple est riche, il n’y a aucun
problème. Think, Barton.
C’est triste. Le club auquel je suis lié, c’est Newcastle
(2007-2011). On est descendus, on est remontés. On est revenus de loin et les
fans n’oublient pas. Quand les joueurs viennent pour l’argent, ce n’est pas la
même chose. Là, on s’est battus pour le club. Moi, Andy Carroll, Gutierrez, on est
tous restés et on a ramené l’équipe au sommet.
– Vous allez faire la même chose à Marseille ?
Bah ouais tiens vas-y, essaie de faire la même
chose et de descendre. On va se marrer.
– Ce n’est pas la même chose. Marseille a fini 10e, Newcastle
était en L 2 ! Mais oui, je viens ici pour gagner des titres, je ne viens pas
en vacances, ni en touriste.
C’est une bien belle déclaration.
C’est un défi pour moi, pas seulement professionnellement, mais aussi
personnellement, de découvrir une autre culture. Pour moi, c’est important.
Tu vas kiffer la bouillabaisse. A la menthe.
– Vraiment ?
– Si tu veux gagner, il faut sentir la ville. Si j’avais été un
peu plus jeune, j’aurais vécu en centre-ville. J’aime voir les fans le matin,
leur parler.
Alors des fans qui habitent des centres
villes, ce n’est pas exactement la sociologie démographique des grandes villes
françaises. Peut-être devant Pôle emploi.
Si tu as de la chance, tu joues au foot entre dix-sept et
trente-cinq ans. Les joueurs s’achètent des grosses voitures et roulent à fond,
ils ne profitent pas.
Pas compris le lien. Tu veux dire qu’ils se
tuent en roulant à fond ? Que rouler à fond, ce n’est pas profiter du
paysage d’arrière pays des campagnes si belles de notre si cher pays ?
Moi, je veux en profiter. Quand j’étais petit, j’allais à
l’entraînement d’Everton et j’attendais les joueurs après. J’aimais ceux qui
s’arrêtaient, pas ceux qui se prenaient pour des superstars et qui filaient en
voiture.
AH OK. En fait, en profiter pour un joueur,
c’est acheter un vélo et s’arrêter à chaque fois que quelqu’un veut te parler,
bref, c’est passer deux jours pour faire 5 bornes. Oui mais dans ce cas là, tu
ne restes pas longtemps joueur professionnel. Mais quel dilemme.
– Vous connaissez un peu les supporters marseillais ?
– Je me souviens de ce match de Ligue des champions avec le but
de Valbuena (à Liverpool, 1-0, 11 décembre 2007). Ils
avaient mis une belle ambiance. J’étais en ville vers une heure de l’après-midi
et ils chantaient déjà. Pourtant, le coup d’envoi était à 20 h 45 !
Toi aussi tu découvriras les vertus du Ricard
en milieu de journée. C’est juste grand.
Je me disais qu’ils n’auraient plus de voix en arrivant au stade.
Mais ils ont chanté toute la soirée. En Angleterre, pour l’atmosphère et les
fans, Newcastle s’en approche.
C’est à dire, ils ont un accent qui chante et
fleure bon la lavande aussi ??
– Vous étiez en contact avec d’autres clubs ?
– Oui, j’ai parlé à Fenerbahçe et avec le Valence CF. Mais je
n’ai pas trop hésité quand Marseille est arrivé, c’était un bon challenge pour
moi. Je connais la situation. Ils ont fini dixièmes, tout le monde est déçu,
ils ont vendu des joueurs pour équilibrer les comptes.
Que tu es venu directement déséquilibrer donc.
On est l’outsider, mais ça me va.
– Vous vouliez vraiment quitter l’Angleterre ?
– Moi, avec mes douze matches de suspension… Tout le monde
disait : “Laissez-le partir, c’est un bon joueur mais il est fou.” Les gens me
sous-estiment.
Tu es encore plus fou que ce que les médias
annoncent donc. Tu es dangereux.
J’ai été en prison, quand je suis sorti, les gens ne disaient
pas que j’étais un mauvais joueur, mais que j’étais fou.
Le tourisme carcéral se développe, tu connais
les Baumettes ? Tu demanderas à Brandao sinon.
C’est difficile pour moi. O.K., c’est vrai, j’ai fait des choses
stupides.
Faute avouée…
Mais j’ai trente ans et j’ai peut être été impliqué dans cinq ou
six incidents. Soit j’étais saoul, soit ç’a a duré une minute ou deux.
C’est drôle mais pour moi c’est différent,
c’est quand je suis saoul que ça dure une minute ou deux.
– En France, on a beaucoup parlé de l’incident avec Ousmane Dabo
(1).
C’est bien la seule fois qu’on a parlé
d’Ousmane Dabo en France.
– Je connais la vérité, il connaît la vérité. Dans ma vie, j’ai
vu cinquante incidents entre des joueurs à l’entraînement. Je ne sais pas
combien de fois j’ai pris des tacles à l’entraînement et je n’ai rien dit.
Dabo, pour moi, c’est de sa faute.
Il n’avait qu’à pas foutre sa jambe sous mes
crampons à 1m30 du sol.
– Vous n’avez donc pas de regrets ?
– Non, aucun. Je suis un homme, c’est un homme. Il me frappe, je
réponds. Moi, là d’où je viens, ça marche comme ça.
De prison donc.
Si je frappe quelqu’un, le minimum que j’attends, c’est qu’on me
frappe en retour !
C’est toi qui te fais défoncer dans Fight club
ou pas ?
Mais je n’aime pas me battre, je ne suis pas un bagarreur.
En version civilisée, on peut appeler cela du
SM, bondage…
– Vos douze matches de suspension (2), c’est aussi à cause de votre
réputation ?
Il en faut un tout petit peu plus quand même…
– Oui, c’était aussi politique, parce que je critique beaucoup
le système.
Et oui c’est toujours la faute de la société.
Il y a temps où Charles Péguy déclarait « Tout commence en mystique et
tout finit en politique ». Au lendemain de la mort de Moon, c’est un
message fort Joey.
Je critique l’équipe nationale : on prend toujours les mêmes
jusqu’à ce qu’ils aient cinquante ans. Et on voit que ça ne marche jamais.
Einstein disait : “La définition de la folie, c’est quand on fait la même chose
encore et encore et qu’on attend un autre résultat.”
Comme toi quand tu t’emportes, tu frappes en
fait ? C’est bien de la folie donc.
Je suis très critique aussi avec la Fédération. À chaque fois
que j’ai un souci, ils m’appellent, j’y vais, je m’assois, je vois un type qui
a cent ans, qui est en costume, qui n’a jamais joué au foot de sa vie, et c’est
lui qui me dit : “Mr Barton, c’est mal de faire ça.” Tu n’as jamais, jamais été
au stade, qu’est-ce que tu en sais ?
Pas seulement au stade Joey, c’est mal tout
court. Pas besoin d’être un footballeur pour le savoir.
– C’est difficile d’attendre encore neuf matches ?
– Oui, un peu. Ç’a été dur sur le moment. Je suis parti en
vacances.
Bah ouais, je n’allais pas rester à Londres quand
même.
Je me suis dit : “Je pense que je peux encore jouer au plus haut
niveau.” Je ne veux pas laisser les critiques gagner.
Tu joues seulement contre les critiques. Un
peu d’ambition gamin !
– Votre femme est heureuse de découvrir Marseille ?
C’est là où on voit que la journaliste est une
femme, impossible d’imaginer un journaliste homme qui pose cette question à
Joey Barton : « alors elle est heureuse ? satisfaite ? vos
heures d’entraînements ? elle est là à l’hôtel ? »
– On n’est pas mariés.
C’est là où on voit que la journaliste est une
femme, un mec qui répond « attends ma grande, on n’est pas mariés, elle
fait ce qu’elle veut, moi aussi. Hein ? tu m’as compris ? »
On est ensemble depuis cinq ans, je devrais peut-être accélérer,
là-dessus. Je n’aime pas les mariages, on doit toujours inviter des gens qu’on
n’aime pas vraiment. Moi, si je me marie, je serai honnête. Je dirai : “Écoute,
je t’aime bien mais pas assez pour t’inviter !” »
Ah non pardon, ce n’était pas pour cette
raison. Juste parce que le mariage, on ne peut pas inviter qui on veut, putain
d’analyse de fou.
Sur Twitter : @TheSpoonerWay
A retrouver sur horsjeu.net : http://horsjeu.net/fil-info/au-courrier-du-coeur-joey-barton-vs-the-spooner/